I. Immortalité
Je suis morte tant de fois, o mon aimé,
d'une douleur insolite dans ma poitrine !
Je suis morte tant de fois dans mon lit
d'obscurité, d'amour désespéré,
que peut-être une mort véritable
me méprisera-t-elle comme ce volubilis
qui sans pitié en vain fut anéanti,
et qui resurgit dans la dure solitude
de ces fleurs rouges en détresse,
dans l'ombre furieuse de ses feuilles.
II. Si tu ne m'aimes pas
Ô chant de tourterelles dans les vestibules
de la mort ! Le jasmin embaume en vain
les lèvres des brises de l’été.
Comme par la nuit obscure d’un bordel,
je cherche l’amour
fallacieux dans les ténèbres
Dans une chambre, sans tes portraits,
je commets, te haïssant, des meurtres
ô
régions de limbes et de brumes !
Les oiseaux reviennent
entre les feuilles
et le sol s’ouvre comme un lac bleu.
Des fleurs rouges illuminent les ombres
J’entends les arbres
du ciel grandir,
mais tout se fait poussière si tu ne m’aime pas
:
de la couleur de la mort des branches.
III. Tue-moi
Tue-moi, splendide et sombre amour,
si tu vois dans mon âme s’égarer l’espérance,
si le cri de douleur en moi se lasse,
comme dans mes mains succombe cette fleur.
Dans l’abîme
de mon cœur
tu trouvas un espace digne de ton attente,
en vain de ton ciel tu m’éloignas
laissant en flammes ma désolation.
la misère, la
richesse
de qui connaît toute ta joie.
Contemple mon hypnotique tristesse.
¡ O toi qui me fis don de l’harmonie
!
Je crois sans espérance en ta promesse.
Amour contemple-moi, dans tes bras, prisonnière.
IV. L'Oubli
Amour désespéré, tu cherches
l'oubli
comme les papillons recherchent la lumière
dans la fulguration du feu mélancolique.
Je sens que ta souffrance en moi se pose
comme sur ces chétifs jardins
où chante la voix d'une tourterelle
perdue sur la corniche d'une maison
abîmée de la ville, entre jasmins.
V. Le Fleuve et les roses
Rejoignons la rive de ce fleuve
où les brises bercent le feuillage
des saules endormis du paysage,
qui cherchent dans l'ombre de l'été
les fraîcheurs mystérieuses de l'eau.
Plongeons nos mains dans les ondes,
et dans le tumulte des herbes profondes,
baisons sur les roses nos lèvres. |